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Focus sur le Crowdlending

  • Etienne
  • 31 janv. 2017
  • 9 min de lecture

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Chapitre I - Le financement des TPE/PME sans les banques : émergence d’alternatives au financement bancaire

3 - Focus sur le Crowdlending

Rapidement après l’entrée en vigueur du décret autorisant l’activité du financement participatif en prêt, le nombre de plateformes s’est multiplié. C’est près d’une soixantaine de plateformes qui ont cherché à se lancer entre fin 2014 et 2015. Cependant aujourd’hui seule une dizaine d’entre elles enregistre une réelle activité. Ce chiffre continue d’évoluer mais semble se stabiliser. Toutes celles qui ont survécu semblent se fonder sur un fonctionnement similaire. Nous allons étudier leur fonctionnement et voir les prestations qu’elles proposent à la fois aux prêteurs et aux emprunteurs.


3.1 – Le fonctionnement des plateformes


Le crowdlending ne se différencie pas des fintech dans le sens où l’expérience client est soignée et vise la simplicité d’usage. L’interface se veut centrée sur le client afin que celui-ci, quel qu’il soit, prêteur ou emprunteur, puisse s’orienter facilement sur la plateforme. Toutes les plateformes affichent dès la page d’accueil les onglets « prêter » et « emprunter » afin de s’adresser à la bonne cible et toutes les informations clés sont mises en avant.


[endif]--Il est alors très simple de comprendre le fonctionnement de la plateforme. Si on se place du point de vue de l’entreprise, nous obtenons dès la première page les critères d’éligibilité. Vérifier son éligibilité se fait en deux étapes. L’entreprise doit contrôler elle-même si elle correspond au profil des emprunteurs.


Les critères varient quelque peu d’une plateforme à l’autre. Chez Lendix, la 1ère plateforme française de prêt en termes de volume, seules les sociétés justifiant d’un chiffre d’affaires minimum de 400 000€ et profitables peuvent prétendre à la deuxième étape d’éligibilité. Pour la plateforme Lendopolis elles doivent avoir plus de deux ans d’existence et un chiffre d’affaires supérieur à 150 000€. Si le profil de l’entreprise répond à ces points, l’entrepreneur doit ensuite renseigner plus d’informations sur l’entreprise pour s’assurer de son éligibilité. Il fournit le numéro Siren de la société, le montant du financement recherché, la durée du financement souhaité et le plus souvent son chiffre d’affaires. Grâce à un système de scoring, les plateformes informent quasiment instantanément par emails les porteurs de projets sur leur éligibilité.



Si l’entreprise est pré-qualifiée, elle doit ensuite déposer un projet présentant son activité et expliquer la raison de l’emprunt. Elle fournit aussi les liasses fiscales des trois dernières années, l’atterrissage de l’année en cours et un prévisionnel. Ces données sont ensuite soumises à la validation d’analystes financiers. La réponse se veut très rapide. A titre d’exemple, Lendopolis se prononce en 5 jours et il suffit de 48 heures à Lendix pour communiquer sa réponse. Les analystes déterminent un niveau de risque pour les prêteurs. Les notes de risques, allant de A+ à C, contribuent à fixer le coût du crédit pour l’entreprise. Si le projet est validé, il apparaît alors sur la plateforme et les prêteurs ont ensuite une période de 30 jours pour choisir de prêter à la société.


Si le projet réussit à collecter la somme nécessaire dans le laps de temps il reçoit les fonds, autrement les prêteurs sont remboursés de la somme versée et le prêt n’a pas lieu. Bien entendu, plus l’entreprise atteint son objectif rapidement, plus vite elle reçoit le montant du prêt.


Les plateformes ont pour objectif de fluidifier les demandes de prêts. Elles misent sur une simplicité d’utilisation et sur des délais réduits au maximum pour délivrer un service innovant et justifier un coût élevé. La collecte de fonds auprès de particuliers doit également se faire en parallèle de manière simple et effective afin de financer un maximum de projets.


Le processus pour prêter à une entreprise se veut également très simple. Pour commencer à prêter de l’argent il suffit de s’inscrire en renseignant uniquement son nom, son adresse email et son adresse postale. On peut ensuite abonder son compte avec sa carte bancaire (ou par virement) du montant qu’on souhaite investir. Toutefois, si nous souhaitons prêter plus de 1000€ en une seule fois ou si nous dépassons le seuil de 2500€ prêtés par an il faut fournir un justificatif d’identité et un justificatif de domicile afin que la plateforme puisse vérifier notre identité. Ceci est une obligation légale imposée par l’Union européenne pour lutter contre le blanchiment d’argent. Il suffit alors de numériser ses documents et de les charger sur son espace dédié pour prêter des sommes plus importantes.


Le particulier peut ensuite choisir les entreprises pour lesquelles il souhaite prêter une partie de son épargne dans une liste de projets à financer. En quelques clics il peut lire la présentation de la société, accéder à un compte de résultat et un bilan simplifiés et comprendre le projet de financement. La plateforme émet également un avis pour aider le prêteur dans sa prise de décision. « Le mot de l’analyste » comme s’appelle cette rubrique sur Lendopolis, permet de souligner les points forts et les points faibles du dossier. La capacité d’autofinancement et la capacité de remboursement de l’emprunt y sont calculées. Les principaux ratios tels que le niveau d’endettement sur les fonds propres y apparaissent également. Le prêteur connait la durée de l’emprunt et le niveau de risque grâce à sa notation. Le taux d’intérêt est mis en avant et nous pouvons simuler combien nous percevrons mensuellement selon le montant prêté.


Le système se veut le plus transparent possible. Les informations sont facilement accessibles et le fonctionnement est facile à appréhender. Les plateformes cherchent à réduire les contraintes en limitant le nombre de documents à fournir afin d’accélérer le processus au maximum. L’objectif des plateformes est de réconcilier les entreprises avec le processus d’obtention de prêt grâce à un mécanisme simplifié. Le crowdlending incite aussi les épargnants vers du long terme tout en leur offrant le sentiment d’investir leur argent dans l’économie réelle en leur permettant d’avoir un réel impact sur les petites et moyennes entreprises françaises.



3.2 – Prestations et propositions de valeur


Dans un contexte de taux bas, les internautes-investisseurs sont à la recherche de rendement pour leur épargne. Ces plateformes se présentent comme une opportunité en annonçant des taux de rendement compris entre 4 et 9%. Cette rémunération peut sembler utopique en la comparant au taux actuel du livret A à 0,75% (service-public.fr, 2016) mais c’est le prix nécessaire pour convaincre les épargnants de migrer sur des placements plus risqués.


En effet le risque de défaillance des entreprises est réel. D’après les statistiques de la Banque de France, à fin juillet 2016, le nombre cumulé de défaillances de PME sur 12 mois s’élève à 60 187 (en baisse de 4,7% par rapport à l’année précédente) sur les 3,56 millions d’entreprises en France (Banque de France, 2016). Pour rappel, en incluant les microentreprises (sociétés employant moins de 10 personnes) les PME représentent 99,8% des entreprises françaises (Insee, 2015). Toutefois la réglementation cherche à protéger les investisseurs en leur autorisant un maximum de 2000€ investi par projet (depuis le 28 octobre 2016, 1000€ antérieurement) pour limiter les dommages en cas de non recouvrement de la dette.


De plus, les intermédiaires encouragent fortement à diversifier le portefeuille d’investissement ce qui est facilité grâce au montant minimum à investir de 20€ par projet. La maitrise du risque est un vrai facteur d’attention pour consolider la confiance des investisseurs dans ces plateformes.



La motivation des prêteurs est compréhensible mais quelles entreprises se financent aujourd’hui à des taux aussi élevés ? Alors que le taux moyen des crédits aux entreprises était de 1,86% (Banque de France, 2016) pour les financements moyens et long terme comment est-il possible d’attirer des PME avec une qualité de crédit jugée bonne sur des plateformes proposant de s’endetter à 4% minimum ?


Les plateformes axent leur communication sur ces trois principales promesses :

  • La vitesse du financement

  • L’absence de garantie ou de caution

  • La communication auprès des prêteurs

La souplesse offerte aux entreprises par rapport aux banques est leur principal argument. Elles soulignent la rapidité de réponses par rapport aux acteurs historiques considérés comme peu réactifs. Sur Lendopolis, la durée moyenne d’une collecte est de 11 jours (Lendopolis.fr, 2016). Pour les PME cette rapidité est clé car elles n’ont pas la même visibilité sur leur carnet de commande que les grandes entreprises. Leur activité est beaucoup plus volatile et leur chiffre d’affaires peut évoluer rapidement. Décrocher un nouveau marché peut donc influencer fortement le besoin de financement d’une petite entreprise. Prenons par exemple le cas d’une entreprise qui remporte un important contrat qui nécessiterait 100 000€ d’investissement pour l’honorer. Si l’entreprise doit délivrer son service dans un délai de quelques mois, lever des fonds sur une plateforme lui permettra de collecter la somme dans un laps de temps suffisant pour répondre positivement à son client.


La société Landreau C.E.B, a emprunté 320 000€ sur la plateforme Lendix en l’espace de 4 jours. Son dirigeant, Yves Landreau illustre bien ce dernier point en justifiant son emprunt ainsi : «Ca a permis de répondre à un marché et ça a permis de satisfaire mes clients. […] Pouvoir satisfaire un client, ça vaut cette augmentation de taux ». (francetv.fr, 2016) Dans ce cas de figure, l’emprunt ne se base pas uniquement sur les comptes historiques de la société mais également sur le prévisionnel de l’entreprise ce qui n’est généralement pas concevable chez les banques. La vitesse de collecte des fonds est donc une vraie valeur ajoutée pour le crowdlending.


Par ailleurs, l’absence de garantie est aussi un argument important pour les chefs d’entreprises. Pour diminuer le poids du risque, les banques réclament souvent aux entrepreneurs des cautions (telles qu’une caution personnelle ou d’un fonds de garantie) ou des garanties (telles que le nantissement d’un fonds de commerce ou de l’immobilier de la société). Ces précautions augmentent le risque personnel du dirigeant alors que dans le cas d’une SARL par exemple, le capital investi devrait représenter son seul risque financier. De plus, ceci augmente les contraintes administratives en nécessitant plus de documents à fournir et augmente les délais d’obtention d’un prêt. Ceci est une autre forme de coût qui peut peser sur les dirigeants.


Les banques privilégient les crédits à l’investissement sur du « dur » comme le matériel ou l’immobilier, qui leur procurent une garantie. D’après la banque de France, au deuxième trimestre 2016, 93% des demandes de crédits d’investissements ont été accordés aux PME contre 83% pour les crédits de trésorerie. L’écart est encore plus grand pour les TPE avec 82% des crédits d’investissement satisfaits contre 69% de crédits de trésorerie. Les prêts adossés à des équipements fonctionnent donc bien mais les problématiques d’investissement ont évolué dans le temps.


D’après Nicolas de Feraudy, directeur de Lendopolis, il y a 15 ans l’immatériel représentait 1€ sur 25€ investi, aujourd’hui les besoins ont évolué avec 1€ sur 3€ investi dans l’immatériel. Ceci signifie que la politique de risque des banques n’est plus en phase avec les besoins des entreprises. Le poids du financement des équipements ou de l’immobilier diminue par rapport aux besoins de financements immatériels comme le développement d’un site web, les campagnes marketing, la recherche et développement ou encore les recrutements.


On peut expliquer ce phénomène par la digitalisation de notre société d’une part mais également par la diminution du poids de l’industrie dans l’économie au profit des services nécessitant moins d’investissements matériels. Jusqu’à présent si une société se voyait refuser un financement, seules deux solutions se présentaient à elle : abandonner le projet au risque de freiner son développement ou utiliser sa trésorerie. Mais l’utilisation court-terme des disponibilités pour des investissements long terme déséquilibre la structure financière de l’entreprise et la met en danger. L’absence de garantie demandée par le crowdlending est une force pour attirer les entreprises voulant financer des projets difficilement finançables par les banques et semble en adéquation avec l’évolution du marché des crédits.


Enfin la troisième proposition de valeur est celle de la communication. De par leur rôle d’intermédiaire, les plateformes assurent une visibilité à une entreprise et son dirigeant auprès du public. Sur Unilend, il y en a moyenne 482 prêteurs par projets. C’est autant de profils différents, avec des expériences et des expertises différentes qui s’intéressent à l’entreprise emprunteuse. Sur Lendopolis, le ticket moyen par projet est de 168€, c’est-à-dire que pour un emprunt de 100 000€, ce sont 595 individus qui prêtent directement à l’entreprise. Sur cette dernière plateforme il y a même un système de forum dans lequel les prêteurs peuvent échanger directement avec l’équipe dirigeante. Ceci crée du lien, donne du sens au projet pour les prêteurs et peut parfois fois déboucher à des rencontres enrichissantes pour les entrepreneurs.


Si le crowdlending n’a pas pour objectif d’être un support de communication, il est tout même un relais de par sa nature. De plus, le système de prêt collectif étant relativement récent, il est très médiatisé dans la presse. Le terme crowdlending apparaît dans près de 900 articles en français en deux ans (Factiva, 2016). Plus de 80 articles parlent des différentes formes de crowdfunding dans L’Agefi et plus de 60 dans Les Echos. Les entreprises emprunteuses sont souvent mentionnées à titre d’exemple ce qui leur offre une autre forme de visibilité. La presse locale relaie également les informations sur les crédits participatifs octroyés aux entreprises de la région en raison de leur aspect innovant. Au-delà de la simple communication auprès des prêteurs de la plateforme, le crowdlending permet d’être médiatisé et de gagner ainsi un peu de notoriété.


Nous avons vu que le crowdlending se distingue du crédit bancaire en proposant une offre différenciante. Les bénéfices de la rapidité, de se financer sans garantie et l’opportunité de créer un réseau doivent compenser le coût plus élevé du prêt. Les montants levés étant relativement faible l’impact de quelques points de pourcentage d’intérêts est compensé par ses services additionnels.


Il est vrai que les montants empruntés sont peu élevés. Au premier trimestre 2016, les entreprises qui se sont financées grâce au crowdlending ont emprunté en moyenne 102 484€ . Le coût ne doit plus être l’unique critère dans le processus de recherche de financement mais doit incorporer[endif]-- d’autres variables. Nicolas de Feraudy dit que si les entreprises ne pensent pas tirer de bénéfices des possibilités offertes par le crowdlending alors elle ne devrait pas emprunter sur les plateformes.

Mais au-delà l’offre de ces plateformes, quel est le coût réel de ces prêts et les prêteurs perçoivent-il vraiment le taux affiché sur les projets ?

C'est ce que nous verrons dans notre prochain post.

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