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Etude Macroéco: Pour quelles raisons des alternatives ont émergé ?

  • Etienne
  • 13 févr. 2017
  • 7 min de lecture

Chapitre II - L’essor du financement participatif est-il conditionné par l’environnement macroéconomique ?

L’industrie financière est confrontée à une nouvelle forme de concurrence. Les fintech ont développé de nouvelles sources de financement pour les entreprises. Ces acteurs ciblent aussi bien les financements de hauts de bilan avec le crowdequity que ceux de bas de bilan via le crowdlending. Ces startups pénètrent ainsi le marché des sociétés de capital-risque et des banques tout en démocratisant l’investissement des particuliers. L’argent de ces derniers devient une source directe de financement de l’économie.

Mais dans une industrie encore très contrôlée comment ces fintech peuvent-elles se faire une place sur le marché du financement des PME ? Quels facteurs vont leur permettre de se développer pour vraiment s’imposer dans le paysage du financement de PME et pourquoi des alternatives sont apparues ?

1 - Pour quelles raisons des alternatives ont émergé ?

Longtemps considéré comme une citadelle imprenable le secteur bancaire est donc aujourd’hui confronté à de nouveaux entrants sur son marché. Les barrières à l’entrée ont longtemps repoussé toute entreprise à se lancer à l’assaut du secteur mais le numérique et les nouvelles technologies ont rebattu les cartes et ont permis d’ébrécher le système en place.


L’activité séculaire qu’est la banque est aujourd’hui menacée à son tour par l’ubérisation. Ubérisation, ce néologisme, synonyme d’innovation pour certains et qui suscite de l’agacement pour d’autres, peut-il vraiment s’appliquer à un secteur tel que celui des banques et du secteur de la finance dans son ensemble ? B. Bathelot, professeur agrégé de marketing spécialisé dans le marketing digital, décrit ce mot ainsi « l’ubérisation est généralement utilisé pour désigner le phénomène par lequel une start-up […] liée à l’économie digitale peut menacer et remettre en cause rapidement un vieux modèle de l’économie « traditionnelle ». Bien que depuis sa création, la banque cherche continuellement à s’adapter à son environnement, il semblerait qu’aujourd’hui de nouveaux acteurs la prennent de vitesse rendant son modèle vieillissant, dans une économie de plus en plus dominée par le digital.

Mais est-ce uniquement le digital qui est à l’origine de l’apparition de ces startups dans le monde de la finance ? Les banques, implantées depuis des décennies voire des siècles n’auraient-elles alors pas les ressources pour contrer ces nouveaux arrivants en déployant les moyens nécessaires ?


1.1 Changements sociétaux
La technologie joue effectivement un rôle clef dans l’émergence des fintech, toutefois la plupart des acteurs bancaires disposent également de cette technologie. Plus que de révolution technologique, nous pouvons parler de révolution d’usage. En effet, ces nouvelles entreprises reposent sur les changements sociétaux opérés ces dernières années. Les fintech spécialisées dans le paiement ou également les néobanques, par exemple, s’appuient principalement sur l’usage du smartphone or, en 2015, 70% des français en possèdent un. On observe également une augmentation du poids de l’e-commerce dans l’économie qui témoigne d’un gain de confiance en internet pour réaliser des transactions monétaires en ligne. Nous reviendrons sur ce point ultérieurement.

Autre exemple, de changement sociétal : le développement du marché de la consommation collaborative. Ce marché semble, à première vue, difficilement applicable au secteur financier et concerne plutôt les secteurs de l’hôtellerie avec AirBnb ou du transport avec BlaBlaCar ou encore Drivy. Toutefois, avec 52% des français ayant déjà effectué en 2013 une transaction entre particuliers via des plateformes et plus de 270 plateformes en ligne, la consommation collaborative engendre un vrai changement dans notre manière de consommer. Certaines fintech se sont basées sur cette fibre collaborative pour construire leur business model et ont lancé ainsi des plateformes de financement participatif.


En s’adaptant ainsi aux nouveaux usages et en se positionnant sur des activités spécifiques les startups ont réussi à émerger aux côtés des banques. Celles-ci de par leur taille n’ont pas l’agilité de ces nouveaux acteurs. Les processus en interne sont allongés et la prise de décision en est ralentie. Cet environnement n’est pas propice à l’innovation. Toutefois la structure des banques n’est pas l’unique cause de leur difficulté à innover et à s’adapter aux nouveaux usages comme le font les nouveaux entrants.





1.2 La crise financière et ses conséquences sur le financement des entreprises
Les banques sont soumises à des contrôles et des obligations contraignantes qui réduisent leur capacité d’adaptation. Si la crise financière de 2008 a en partie favorisé le développement de l’économie dite collaborative, elle a surtout impacté les banques structurellement. Les modifications apportées aux accords de Bâle II en 2009 puis les accords de Bâle III en 2010 ont conduit à un resserrement du crédit bancaire. Ces réformes visent à accroître la résilience du secteur bancaire afin d’améliorer sa capacité à absorber les chocs de futures crises financières ou économiques. Les accords de Bâle III s’articulent autour des trois piliers de Bâle II : des exigences minimales de fonds propres, une procédure de surveillance prudentielle et une discipline de marché ; et s’emploient à renforcer le dispositif mondial des fonds propres et l’instauration de normes mondiales de liquidité (Comité de Bâle, 2010).

Dans un souci de rassurer les marchés et les particuliers, les discussions autour des accords de Bâle III se sont faites relativement vite. L’objectif premier était de renforcer la solvabilité des banques et réinstaurer la confiance pour éviter des « bank run » ou « ruées aux guichets » qui avaient eu lieu lors de précédentes crises. Pour cela le ratio McDonough de Bâle II (qui remplaçait jusqu’alors le ratio Cooke instauré lors des accords de Bâle I en 1988) a été revu et les banques doivent maintenant atteindre un minimum de fonds propres réglementaires au regard des risques pondérés de 8% avec 6% composé de fonds propres Tier 1. Les 2% restants sont des fonds propres Tier 2 (composés de fonds de garantie et de provisions). A cela s’ajoute un coussin de sécurité de 2,5%. Le ratio de solvabilité est donc désormais de 10,5%, en hausse de 2,5 points de pourcentage par rapport aux accords de Bâle 2.




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Toutefois, comme mentionné ci-dessus, les fonds propres ne représentent pas le seul risque pour les banques en période de crise. La liquidité à court terme est également un point crucial de la résistance des banques en cas de crise financière. Lehman Brothers en est l’exemple. En 2008, la banque d’investissement était solvable mais c’est un problème de liquidité à court terme qui a causé sa faillite. Afin de contenir ce risque, les accords de Bale III prévoient deux ratios de liquidité : un ratio de liquidité à un mois (« liquidity coverage ratio ») et un ratio de liquidité à un an (net stable funding ratio).

D’après l’ACCA (Association of Chartered Certified Accountants), les accords de Bâle III affectent directement les PME. Les offres de prêts bancaires tendraient à être moins adaptées aux besoins des petites et moyennes entreprises. Celles-ci privilégient le financement long-terme tandis que les banques sont encouragées à accorder des prêts court-termes pour respecter les ratios de liquidité imposés. Par ailleurs, l’ACCA souligne que les prêts aux PME ont une pondération de risque relativement élevés comparés aux prêts aux grandes entreprises. Ceci entraîne un coût élevé de capital pour les banques et contribue aux resserrements des crédits accordés aux plus petites entreprises. En effet, les banques mesurent le risque en termes de « Risk-Weighted Asset » (RWA), c’est-à-dire que lorsque la banque accorde un financement, elle mobilise une partie de son capital en fonction du niveau de risque. Ainsi chaque crédit a un risque pondéré qui lui est associé et plus le poids du risque est important plus cela requiert de fonds propres. Par conséquent une PME de par sa plus petite structure financière aura un risque pondéré plus élevé qu’une grande entreprise disposant de plus de ressources.



Suite à la crise de 2007, on a donc pu constater une contraction des financements bancaires accordés aux sociétés non financières. Cependant, le besoin en fonds des entreprises est perpétuel et la réaction des banques à la crise a laissé un vide dans les solutions de financements. Ce vide représentait une opportunité pour de nouveaux acteurs. En réinventant le prêt aux entreprises, des startups se sont développées pour répondre à leur besoin de financement. Ces nouvelles sociétés, sans échapper à toute forme de régulation, bénéficient toutefois de règles plus souples par rapport aux banques pour proposer des financements.

Notons toutefois que les dispositifs de Bâle III sont internationaux et n’ont pas eu le même impact dans tous les pays. Si dans tous les pays impactés par la crise, nous observons un recul des encours de crédits aux sociétés non financières à partir de janvier 2009, les conséquences sur les crédits varient fortement d’un pays à l’autre. Le Royaume-Uni est fortement impacté par la crise et les crédits bancaires continuent de diminuer d’année en année. A contrario, les crédits français ont retrouvé leur niveau d’avant crise en 2011 et les crédits octroyés aux entreprises ont continué d’augmenter depuis (Banque de France, 2015). La zone euro dans son ensemble n’a elle pas retrouvée ses encours de crédits d’avant crise mais la situation est toutefois moins marquée qu’au Royaume-Uni.

Crédits aux sociétés non financières en Europe

Contrairement à ce qui avait été prédit et ce que nous supposions, les nouvelles normes imposées par Bâle III ont eu impact plutôt limité sur l’octroi de financements pour les PME françaises. Ceci explique que l’émergence européenne d’alternatives au financement bancaire s’est faite dans un premier temps outre-manche. La société Crowdcube, fondée en 2011 au Royaume-Uni était la première plateforme mondiale à proposer à des particuliers d'investir dans le capital des PME (Pekmezovic, 2015). Autre exemple, la plateforme Funding Circle, premier site aujourd'hui de crowdlending au Royaume-Uni, fut créée en 2010. Il faut attendre 2013 pour voir apparaître Unilend, première plateforme de crowdlending française.


La crise financière de ces dernières années a fragilisé la position des banques. Celles-ci ont été contraintes de revoir leur gestion du risque et de resserrer en conséquence les crédits octroyés aux petites et moyennes entreprises. Certains entrepreneurs ont vu là l’opportunité d'offrir une alternative aux entreprises dans leurs sources de financement. S'appuyant sur des changements sociétaux chez les particuliers et les possibilités offertes par internet ils ont innové en construisant une nouvelle façon de se financer pour les PME.

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